La poésie de Mandin s’inscrit dans un ciel orageux.
Pas de romantisme, pas d’illusions mais le déchirement d’un couple face à l’épreuve du temps. Ainsi peuvent être lues les psalmodies passant tour à tour de l’amour fasciné par l’attrait du corps « ton corps est un poème réincarné
puzzle des mots de toutes tes beautés » à la solitude face au silence de la rupture ainsi qu’à la nouvelle identité de la femme moderne « qui asperge l’Homme de Querelles ».
Le quotidien est au rendez-vous et le couple se dispute dans des haines fréquentes. Leur relation semble sans issue « ta tendresse mon impasse est devenue », ils se déchirent « dans des combats sans avenir », l’ambivalence rend leurs rapports complexes « j’aime en toi tout ce que je déteste ». Il n’est pas question de pardon.
C’est le point de vue de l’homme à travers la plume du Poète qui est mis en valeur et cet homme souffre d’abandon « La lumière me fait hurler de Douleur. Mon corps meurtri par tes abandons la lumière froide et céladon… » La mélancolie cède la place à la solitude, le combat à la lassitude puis la souffrance se fait révolte « je ne peux pas mourir dans l’absence de ton corps ». Le voile est levé sur l’histoire du couple :
« Le seul meurtre en notre histoire c’est celui de mon ombre que tu n’as jamais aimée ».
Changement de décor, pas de place au rêve, le narrateur déchire le rideau !
Il projette au grand jour : « une Jeune Fille sans amant fit l’amour avec sa virginité dans le cristal d’une rivière océanique… » et le Fils-Poète naquit
« couvert d’euglènes, fripé de rimes, les beaux yeux parfumés d’algies ».
Par quelle magie parviendra-t-il à retrouver les origines d’une humanité ?
La Jeune Femme délivre la Jeune Fille de la Mort et redonne à l’âme toute sa dimension poétique. Mais « l’amour est un puzzle que l’on ne peut finir » et l’apparition féminine s’évanouit, immortalisée dans la mémoire de l’auteur.
Mandin nous offre avec talent cette aventure poétique, bouleversante, dérangeante, où la vie et la mort se côtoient ; une odyssée dans la mémoire du Couple.
Elisabeth Chaizemartin Chabrerie