Sans doute le titre NUAGES est complexe à la première levée de tête vers le ciel.

NUAGES est à prendre ici dans tous les sens du mot dans toutes ses interprétations. Mais aussi en l’associant à la chevelure nuageuse de ces femmes, qui offrent une volupté partielle ( par ciel ) aux regards d’intempérie du poète, souvent vêtu à la détrempe.

Il n’y a pas de préface, il y a un poème de Baudelaire. Le texte final tente  de rendre un humble hommage à son poème l’Albatros.

Bien sûr, il n’y a rien de plus nuageux que l’amour, il n’y a rien de plus musical aussi, lorsque les sons s’éparpillent dans l’absolu nuée… une nuée d’esprits, de sensibilités, de sensualités dans le paradis de Néphélé.

« … Il venait d’avoir 15 ans

amoureux de Néphélé depuis sa naissance

ses yeux pouvaient écrire les histoires des nuages…

au fur et à mesure qu’ils passaient

ses regards musicaux étaient cartographes…

Il devint nuageux comme un poète.

 C’est à ce moment qu’il La prévisionna.

Une jeune fille de son âge

belle comme une nuageuse soirée d’orage

… c’est d’ailleurs ce qu’elle était.

des cirrostratus se mirent de la partie et changèrent le temps

en un autre temps.

 Une nuageuse matinée de pluie rencontrait une nuageuse soirée d’orage… »

 

                                                          La boucle semble bouclée.

Lorsque j’avais 15 ans j’ai écrit : «  Je suis nuage noir… nuage blanc je passe… »

 

– Qui aimes-tu le mieux, homme énigmatique, dis ? ton père, ta mère, ta sœur ou ton frère ?
– Je n’ai ni père, ni mère, ni sœur, ni frère.
– Tes amis ?
– Vous vous servez là d’une parole dont le sens m’est resté jusqu’à ce jour inconnu.
– Ta patrie ?
– J’ignore sous quelle latitude elle est située.
– La beauté ?
– Je l’aimerais volontiers, déesse et immortelle.
– L’or ?
– Je le hais comme vous haïssez Dieu.
– Eh ! qu’aimes-tu donc, extraordinaire étranger ?
– J’aime les nuages… les merveilleux nuages qui passent… là-bas… là-bas… les merveilleux nuages

 

Charles Baudelaire : Petits poèmes en prose – L’étranger – (1869)

 

 

 

 

Comme l’albatros le nuage est une image transcendante du Poète. La chevelure de Néphélé, nymphe des nuages est une caresse perpétuelle sur l’âme du Poète enclin au désespoir de l’amour.

CAPILLATURA.

 

Fiancée du poète

la chevelure oscille le temps des

couleurs du temps

les mèches

nuages libres

dispersent

la senteur engainée

essentielle nébuleuse

cascade filamenteuse.

 

Elle est cils sensuels pour un regard

désirant.

Il n’est pas d’arrangement

plus

dérangeant que cette

cataracte de fragrances sensuelles

dans laquelle

se parfument

les yeux

les doigts

les lèvres

du

poète gourmet

amant de Néphélé.

 

Moiteur des lumières échevelées

des cheveux emmêlés

nuageux…            

Un doigt…

porte à la bouche une boucle

tous les parfums érotiques

s’y insinuent.

 

Le poète enroule ses regards dans les mystères de la toison harmonieuse.

Que le reste du corps en soit jaloux !

 

Mêlant l’intrigue

aux visions carnassières

au désir de toucher.

Il mêle

les lianes voluptueuses

à ses doigts affamés

le poète

transforme la longue et

magnifique chevelure ésotérique

en un ciel de traine

… devant ses yeux concupiscents

de géomètre musicien.

 

Il est instruit  

du patient travail

de la kératine en toison.

Elle sculpte chacune de ses mèches

dans l’aura

des beauté des lumières

et des senteurs

et des verbes inventifs

comme ses notes qui arpègent ses boucles.

 

Oui ! Madame

sœur de la déesse Néphélé

votre abondante crinière

est

un ravissement pour le poète aux doigts agiles

fragiles

comme ses mots.

 

Que cet emmêlement des soies

porte

aux portes des arômes occidentaux

les caresses

céréales

bleuets

capucines

coquelicots

gouttes d’ambre.

 

Des mots s’emmêlent

se mêlent

aux boucles nuageuses

filaments soyeux de Néphélé.

Les mains du poète plongent dans une mer de nuages

Enchevêtrés dans l’écume des pâmoison.

Les fils orageux

enivrent ses yeux

embrumés.

Qui donc autre que lui

saurait lécher les fils d’aurore dorée ?

Le doigté sait les rythmes de la volupté

luxurieux cachemire

des cheveux

comme des ondées

désir de caresses fondées.

 

Féerique tissage de fils d’Ariane parfumés.

Femme secrète parée d’une couronne fauviste.

Merveille des résines cuivrées entrelacées.

Senteurs diaprées des toisons envoûtantes.

 

En maître des mouvements aériens

le poète sait le mystère des longues toisons…

 

… cette main

objet de jalousie du poète

lorsque de ses gracieuses  phalanges

elle remet la mèche

insoumise

la coulissant

avec grâce

doigté agile

et

aérien

et

odorant

et

sachant

et

mêlant

chevelure

 et

poésie.

 

Dépit amoureux de n’être pas

un pediculus humanus

immortel

dans cette contrée féerique

toison altière

sans guerrier

mêlant

un désir hirsute

à une épopée amoureuse

sans récompense.

Le poète s’endort dans les innombrables

lèvres

de la fée Capillatura.