Le mot-fantôme

Le mot-fantôme se nourrit des sens d’un mot comme un vampire ; faisant de chaque lecteur un initié.

La subtilité d’une lecture est de pressentir les mots-fantômes qui se faufilent dans un texte.
Le mot-fantôme structure la véritable signification du mot qu’il côtoie, à la manière d’un rémora.
Voilà pourquoi le dictionnaire est la loupe indispensable, pour vérifier tous les sens d’un mot et sentir les interprétations. Ainsi le lecteur peut ressentir le mot-fantôme serpenter entre les lignes, entre les mots. Il apparaît alors, paré de l’histoire du mot, allant dans le sens de l’histoire.
La poésie est un mur entre l’illusion et la réalité, un mur fait de briques, dans chacune d’elle se tient le sens d’un mot. Un même mot peut donc posséder plusieurs briques. Le liant, qui rend le mur solide mais pas infranchissable, est composé de mots-fantômes, mélangés aux regards du sensible. La nature du poème, c’est ce liant.
Le Poète, au pied du mur des sens, est peut-être le seul écrivain à ne pas écrire des livres, mais dans des livres ; car son écriture est suggestive.
Il est une sorte de maçon de l’écriture ; écrivant essentiellement avec des mots-fantômes. Grâce à cela, la sensation de leur présence devient réelle ; sans procédé tendancieux. En lisant le mot qui leur correspond, il est possible enfin d’entendre ce qu’il veut dire.
Quoi entendre dans une écriture poétique, n’est-ce pas le plus important ?

MANDIN